Dans la très belle rétrospective de l’oeuvre brève mais fournie de Nicolas de Staël qui s’ouvre ces jours-ci au Musée d’art moderne de la Ville de Paris on peut voir ce saladier bien garni dont les couverts assortis n’attendent que deux mains habiles à fatiguer la salade sans qu’aucune feuille ne leur échappe. La salade est verte et l’exposition compte plusieurs tableaux aux touches vert amande, vert plus ou moins grisé ou vert céladon, moins attendues que l’éblouissement des coloris des paysages siciliens.
Nombre de tableaux, dont ce saladier et une nature morte aux trois poires, vertes elles aussi, proviennent de collections privées d’où ils n’avaient jamais bougé ; nous les donner à découvrir n’est pas le moindre intérêt de l’exposition. Je lis dans des articles consacrés à celle-ci, qui soulignent tous sa richesse en “inédits”, que les commissaires ont su les débusquer jusqu’en des lieux parfois insolites comme des chalets haut perchés de Gstaad en Suisse.
Je ne sais pas si c’est le cas du saladier mais cela me rappelle une conversation entre Vaudois entendue, en Suisse donc, dans un train à crémaillère. Il y était question du coût de revient du chauffage d’un chalet, justement (avec ou sans collection particulière je ne sais), et chauffer ce chalet coûtait “un saladier” (sic). Une expression probablement locale que je n’avais jamais entendue. Que quelque chose nous coûte un bras ou la peau des fesses, on en a l’habitude et encore plus en période d’inflation, mais un saladier ? Et combien de saladiers a pu coûter le saladier de Nicolas de Staël ? Mystère.
PS J’avais évoqué déjà sur ce blog une exposition consacrée à Nicolas de Staël, c’était au MUMA du Havre en 2014.