Quand j’ai allumé la radio dans la cuisine à midi – mais il était 13h45 – radio restée d’hier soir sur France Musique, Marcel Amont chantait Bleu blanc blond, je ne sais pas si vous vous souvenez de Marcel Amont et de Bleu blanc blond, moi je les avais complètement oubliés et c’est comme s’ils étaient tous les deux, le chanteur et sa chanson, tombés d’une autre planète pile au milieu de ma cuisine.
Je suis sûre qu’il y avait à la maison un 45 tours de Marcel Amont, mais je serai moins affirmative sur les quatre chansons, deux de chaque côté, qui y étaient gravées. Il y avait à la maison un 45 tours de Marcel Amont, comme il y en avait un d’Alain Barrière, un de Gilbert Bécaud, un de Charles Aznavour et un de Jean Ferrat – sur lequel il chantait “La Montagne” et celui-là les parents l’écoutaient en soupirant que c’était bien pour tout le monde pareil et qu’il fallait suivre les paroles.
Je réalise que nous ne possédions qu’un seul disque par chanteur – et pas beaucoup de chanteuses, mise à part Colette Renard, et Paulette Merval qui faisait couple avec Marcel Merkès, au moins pour l’opérette, à la ville je ne sais pas – et pour chef d’orchestre on avait Franck Pourcel. Les disques du frère aîné nous dépaysaient jusque dans les rues d’Antibes, dont je me demandais bien ce qu’elles pouvaient avoir de spécial, avec Sidney Bechett, et encore plus loin avec Tito Puente. J’ai oublié les autres : le frère est tôt parti de la maison avec ses disques.
En écoutant Marcel Amont comme je faisais ma pause déjeuner en plein boulot de rapport quadriennal CNRS, il m’a semblé qu’au temps où son 45 tours tournait sur le dessus du poste et qu’on s’asseyait sur une chaise à côté pour l’écouter en surveillant la progression du bras et qu’il ne sautille pas trop, le monde était plus rond que maintenant, plus complet aussi.
Je ne sais pas trop si c’est à cause de cette bouffée de musiques d’avant, mais voulant rentrer de chez C.D., qui habite à la porte de Saint-Cloud, chez moi ce soir, je me suis trompée de bus et me suis installée dans celui qui a pour terminus “Cité de la Plaine”, celui qu’on prenait au temps de Bleu, blanc, blond, quand on rentrait du cinéma “Le Gudin” – dont on venait de parler avec C.D qui l’a beaucoup fréquenté aussi. J’ai juste eu le temps de redescendre du bus, comme il démarrait.
(J’ajouterai des liens plus tard peut-être : Bleu blanc blond ça n’a pas l’air d’exister sur Deezer)