L'employée aux écritures

le blog de Martine Sonnet – ISSN : 2267-8735

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"Le problème de la nuit reste entier. Comment la traverser, chaque fois la traverser tout entière ?" Henri Michaux

Archives for la vie tout venant

Livraisons d’automne

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Un peu d’autopromotion à laquelle m’incitent les parutions quasi concomitantes ces dernières semaines de trois ouvrages collectifs auxquels j’ai collaboré (sous ma casquette d’historienne).

Il y a le neuvième volume de l’édition, pour la première fois intégrale, du journal du libraire parisien - qui n’a pas tenu boutique longtemps mais est resté sa vie durant impliqué dans la corporation – Siméon Prosper Hardy (1729-1806).

L’entreprise éditoriale, co-dirigée par Pascal Bastien, Sabine Juratic, Nicolas Lyon-Caen et Daniel Roche son initiateur malheureusement décédé en février dernier, est menée de part et d’autre de l’Atlantique par des équipes basées l’une à l’Institut d’histoire moderne et contemporaine à Paris, l’autre à l’université du Quebec à Montréal. Ce neuvième volume de Mes loisirs, ou Journal d’événemens tels qu’ils parviennent à ma connoissance, publié aux éditions Hermann, couvre les années 1786 et 1787. Les deux derniers volumes relateront les années 1788 et 1789, Siméon Prosper Hardy ayant interrompu brutalement sa rigoureuse consignation des jours le 14 octobre 1789.

Pour en savoir plus sur ce journal, on peut consulter le site internet qui lui est dédié. On y accède notamment aux index onomastique, géographique et événementiel mis en ligne au fil de la parution des volumes papier. Pour connaître mieux le libraire, on peut aussi lire une petite étude inédite dans laquelle je me suis attachée à traquer son écriture à la première personne : “Je est Hardy : usages de la première personne du singulier dans Mes loisirs, ou Journal d’événemens tels qu’ils parviennent à ma connoissance.

Les deux autres parutions résultent de mes travaux sur les scientifiques allocataires de la Caisse nationale des sciences, un dispositif de financement de la recherche publique ayant fonctionné entre les années universitaires 1931/32 et 1938/39, préfiguration du CNRS qui en prend le relai à l’automne 1939. Deux chapitres dans des ouvrages collectifs qui viennent de paraître complètent mes précédents articles exploitant mon recensement exhaustif des chercheuses et chercheurs bénéficiaires des bourses et allocations dispensées par la Caisse. J’avais publié déjà des “gros plans” sur le champ des sciences humaines, sur les femmes et sur les chimistes.

Cette fois il s’agit, d’une part, d’une étude s’intégrant à un ensemble de travaux sur la communication scientifique dirigé par Muriel Le Roux : Modalités de la communication scientifique et technique : perspectives historiques / Communicating Science and Technology : Historical Perspectives (Peter Lang, 2023). Mon chapitre « Faire connaître ses travaux : l’accès à la publication de la première génération de boursières et boursiers de la Caisse nationale des sciences » restitue les conditions dans lesquelles les jeunes scientifiques s’insèrent dans le champ éditorial des sciences dites dures.

Enfin, d’autre part, le 27 octobre dernier est paru au Seuil Le monde des mathématiques, sous la direction du sociologue Pierre-Michel Menger et de l’historien Pierre Verschueren, ouvrage réunissant en 832 pages une vingtaine de contributions propres à éclairer sous différents jours la “société mathématique”, ses profils, ses carrières, ses institutions de recherche et d’enseignement, sa conscience de soi, son entre-soi et sa reproduction.

Ma petite pierre à cet édifice – « Deux mathématiciennes à la Caisse nationale des sciences : débuts croisés de Marie Charpentier et de Marie-Louise Dubreil-Jacotin» – porte sur les deux seules mathématiciennes intégrées à ce dispositif, aux côtés de 70 mathématiciens. Deux profils féminins qui s’opposent souvent mais les deux jeunes femmes aux origines et cursus différents se rejoignent dans leur commune difficulté à “faire leur trou” dans un monde qui sans les écarter formellement se pense en grande partie sans elles.

Dans Le Monde daté du 3 novembre 2023, sous le titre « Le Monde des mathématiques : loin des stéréotypes, les mathématiciens », Gilles Bastin rend compte de cet ouvrage.

nov 8, 2023

INTERLUDE

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Après repos hivernal (comme les pelouses des jardins publics), suivi d’un repos printanier, le blog aborde son repos estival pour cause d’interruption de l’image. Une intervention de réparation permettant d’y insérer à nouveau des photographies – souvent supports d’écriture comme dans la série “Poétique de la voirie” – s’impose mais ne sera pas réalisée avant l’automne. Ce devrait être l’occasion de tenter la fusion, sous une forme nouvelle à définir, du vieux site laissé en jachère depuis plusieurs années et du blog. L’employée aux écritures, alors dégagée de ses autres occupations, professionnelles, aura plus de temps et de cerveau disponibles à consacrer à la réouverture de quelques fichiers in progress eux aussi en long repos.

D’ici là, les archives du blog – maison fondée en 2008 – ne demandent qu’à être visitées et même revisitées. Merci au lectorat fidèle de sa patience… et de sa compréhension dirait-on au Montparnasse monde.

juil 5, 2022

Un kilomètre de rayon

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Alors je marcherai droit pour tourner en rond*, cherchant mon nord par la rue Saint-Jacques, poursuivant, dans le sens des aiguilles d’une montre, par les rues Cujas prolongée en Clovis, Descartes, Lacépède, Gracieuse, je contournerai la place Monge, traverserai la rue du même nom, pour prendre la rue Larrey, puis enfiler les rues de la Clef, du Fer à Moulin, Scipion, Vesale, de la Collégiale, avant de traverser le boulevard Saint-Marcel, et de continuer par les rues Michel Peter et de la Reine Blanche ; je traverserai l’avenue des Gobelins pour trouver la rue du même nom, et poursuivrai par les rue Gustave Geffroy, Berbier du Mets et Emile Deslandres ; si j’en suis là aux horaires d’ouverture du jardin ce qui est très probable (8h-19h30 du 25 octobre 2020 au 28 février 2021), je quitterai la rue Emile Deslandres pour traverser le square René Le Gall jusqu’à l’angle des rues Croulebarbe et Corvisart, si par malchance le jardin est fermé pour cause d’intempéries par exemple, je  le contournerai en demeurant rue Emile Deslandres jusqu’à la rue des Cordelières, pour atteindre la rue Vulpian que j’aurai rejointe, si le jardin était ouvert, par la rue Corvisart ; je suivrai la rue Vulpian juqu’à buter sur le boulevard Auguste Blanqui et les voies du métropolitain, ligne 6, Nation-Etoile, entre ses stations Glacière et Corvisart, je marcherai le long du boulevard et des voies jusqu’à la rue de la Santé, avant de continuer par les rues Cabanis, Broussais et Dareau ainsi que par le passage du même nom, puis la rue de la Tombe-Issoire.

Arrivée là j’aurai tracé un demi cercle et deux options se présenteront à moi : faire demi-tour et, dans le contresens des aiguilles d’une montre, revenir sur mes pas jusqu’à la rue Saint-Jacques, ou parfaire mon cercle en rejoignant le boulevard Saint-Jacques par la villa du même nom, les rues Jean Minjoz et Jean-Claude Arnould, avant de traverser la place Denfert-Rochereau en me gardant des voitures et de leurs substituts qui surgissent de partout et de nulle part, pour rejoindre la rue Froidevaux ; si jamais le cimetière du Montparnasse est ouvert je le traverserai pour en ressortir boulevard Edgar Quinet, s’il est fermé, ce que je crains, je le longerai par la rue Emile Bernard pour retrouver le boulevard Edgar Quinet.

Je marcherai là sur mes vieilles brisées, au Montparnasse monde.

Je rejoindrai la rue Delambre par le square du même nom (qui est un bout de rue et pas un jardin contrairement au square René Le Gall qui est un jardin et pas un bout de rue), jusqu’au boulevard du Montparnasse que je quitterai – et le Montparnasse monde avec lui - par le boulevard Raspail et la rue Vavin suivie jusqu’à la rue d’Assas ; encore qu’un crochet soit possible, si j’ai le courage, par la rue Sainte-Beuve pour adhérer sans en perdre une seule miette à la circonférence définie par mon kilomètre de rayon ; butant au bout de la rue Vavin sur les grilles du jardin du Luxembourg, reste à espérer que celui-ci soit encore ouvert (8h-17h du premier au 15 novembre) pour que je puisse le traverser et en ressortir sur le boulevard Saint-Michel ; si le jardin est fermé je le contournerai en continuant sur la rue d’Assas jusqu’à croiser la rue Auguste Comte qui me ramènera boulevard Saint-Michel ; un boulevard que je quitterai par la rue Soufflot, jusqu’à la rue Victor Cousin qui me permettra de rejoindre la rue Cujas ;  quand celle-ci coupera la rue Saint-Jacques, j’aurai bouclé ma boucle.

Mais pas sûre qu’une heure me suffise pour rallier mon point de départ.

(*) Marcher droit, tourner en rond, j’emprunte l’image et l”expression au livre d’Emmanuel Venet (éd. Verdier, 2016) au titre si bien trouvé, car que faisons-nous d’autre que marcher droit pour finalement tourner en rond ?

nov 1, 2020

Notes confinées (semaine 8)

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Du mardi 5 mai au dimanche 10 mai 2020, avec vues sur rue, sur cour ou sur intérieur.

Mardi sur la rue

la grande soif des jardinières aux fenêtres de ceux qui sont partis fait peine à voir.

Mercredi sur l’intérieur

vérifier quand même que dans cette histoire de 2,5kg/personne on compte pour du beurre.

Jeudi sur la rue

si les mardis, jeudis, samedis,  autour des étals du marché, se dansera un bal masqué ?

Vendredi sur la cour

rêve éveillé : imaginer nos enfants mêlés à ceux d’en bas (mais ils ont bien passé l’âge).

Samedi sur la rue

rideaux de fer à demi levés : états des stocks, serpillères et balais, et dérouiller les tiroirs-caisses.

Dimanche sur l’intérieur

clore ici la dernière livraison hebdomadaire de notes confinées quoi qu’il advienne du déconfinement.

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mai 10, 2020

Notes confinées (semaine 7)

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Du mardi 28 avril au lundi 4 mai 2020, avec vues sur rue, sur cour ou sur intérieur.

Mardi sur la rue

toute averse venant reverdir les platanes est source d’espoir.

Mercredi sur la cour

diversification des jeux : apparition d’un croquet et de quilles de bois numérotées.

Jeudi sur l’intérieur

vert, rouge, alerte orange, que chacun voie l’épidémie à sa porte.

Vendredi sur la rue

disparus le fournisseur de muguet communiste français et ses concurrents de sauvette.

Samedi sur l’intérieur

exhumer les pinces à cheveux des vies antérieures qu’on croyait enfouies à jamais.

Dimanche sur la cour

à 17h chaque après-midi, envol des volutes d’un violoncelle voisin.

Lundi sur la rue

un frémissement, comme un frémissement, des prémices, une amorce (et puis rien ?).

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mai 5, 2020

Notes confinées (semaine 6)

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Du mardi 21 avril au lundi 27 avril 2020, avec vues sur rue, sur cour ou sur intérieur.

Mardi sur l’intérieur

compter en semaines (6) plutôt qu’en jours (36) pour tâcher de s’en tenir à un chiffre.

Mercredi sur la cour

ils ont tous bien progressé en badminton sans doute grâce au filet de fortune installé.

Jeudi sur l’intérieur

jusqu’à la nuit même, lourde de rêves confinés, que le jour ne dissipe pas.

Vendredi sur la rue

le joggeur passant sous la fenêtre à 19 heures pile sort de nulle part, forcément.

Samedi sur l’intérieur

les beaux parleurs de chez eux sur nos écrans ont souvent des plafonds moulurés sur la tête.

Dimanche sur la rue

réapprendre à traverser dans les clous comme les chiens réapprendront la laisse, un jour.

Lundi sur l’intérieur

attendre la stratégie du plan (ou le plan de la stratégie) et tourner en bourrique.

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avr 28, 2020

Notes confinées (semaine 5)

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Du mardi 14 avril au lundi 20 avril 2020, avec vues sur rue, sur cour ou sur intérieur.

Mardi sur l’intérieur

la saint glinglin, la Trinité, les dents des poules : aux environs de la mi-mai – à confirmer.

Mercredi sur la cour

les marelles tracées dans les petits cailloux ne sont pas durables.

Jeudi sur la rue

ce frisson à chaque passage de camion frigorifique.

Vendredi sur la rue

statistique personnelle : deux personnes au plus par autobus, même dans les doubles.

Samedi sur la rue sur la cour sur l’intérieur

le geste-barrière n’est pas l’apanage du garde-barrière, heureusement.

Dimanche sur l’intérieur

ce que l’on sait c’est que l’on n’en sait pas beaucoup plus sur la suite.

Lundi sur la rue

tous ces chiens qui habitent la ville dans un rayon de moins d’1 km et que l’on ne connaissait pas.

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avr 21, 2020

Notes confinées (semaine 4)

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Du mardi 7 avril au lundi 13 avril 2020, avec vues sur rue, sur cour ou sur intérieur.

Mardi sur la rue

s’avancer masqués pour une fois qu’avril pouvait nous découvrir d’un fil.

Mercredi sur l’intérieur

pics, plateaux, épicentres, la géographie de 19:15.

Jeudi sur la rue

deux cavaliers et leurs montures carapaçonnés de bleu, chaque jour, au petit trot sur le boulevard.

Vendredi sur la cour sur la rue

nos fenêtres nous ne les verrons plus jamais du même oeil.

Samedi sur la cour

l’érable élagué, de ses jeunes pousses vertes, veut nous dire quelque chose.

Dimanche sur l’intérieur

férié, ouvrable, ouvré, va savoir.

Lundi sur l’intérieur

il faudrait pouvoir en parler au passé mais ce ne sera pas simple.

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avr 14, 2020

Notes confinées (semaine 3)

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Du mardi 31 mars au lundi 6 avril 2020, avec vues sur rue, sur cour ou sur intérieur.

Mardi à l’intérieur

tisser détisser retisser les fils d’infos, faire sa Pénélope sur la toile.

Mercredi sur la rue

l’obstination de l’anticyclone confine à l’insolence.

Jeudi sur la cour

les pâtés de petits cailloux manquent de tenue, il faudrait du sable humide.

Vendredi sur la rue

les valises à roulettes, toutes, métamorphosées en charriots à commissions.

Samedi sur la rue

de nuit, à l’hôpital en face, des fenêtres éclairées qu’on a toujours vu éteintes.

Dimanche à l’intérieur

les chaussures de ville alignées dans l’entrée s’empoussièrent et n’en reviennent pas.

Lundi à l’intérieur

innocente intrusion du dehors la botte de radis prend des airs de cheval de Troie.

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avr 7, 2020

Notes confinées (semaine 2)

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Du mardi 24 mars au lundi 30 mars 2020, avec vues sur rue, sur cour ou sur intérieur.

Mardi à l’intérieur

agendas gommés à perte de vue, angoisse des pages blanchies.

Mercredi sur la cour

deux par deux, les fratries, badmington, sans échange de raquettes.

Jeudi à l’intérieur

les mains récurées y laisseront leurs peaux.

Vendredi sur la rue

les couloirs de bus coulent des jours paisibles.

Samedi à l’intérieur

nos fors intérieurs n’en demandaient pas tant.

Dimanche à l’intérieur

passage à l’heure d’été sans penser l’été.

Lundi sur la rue

plus personne ne compte ses pas : 10 000 par jour on n’y arrivera jamais.

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mar 31, 2020

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