le blog de Martine Sonnet – ISSN : 2267-8735
"Le problème de la nuit reste entier. Comment la traverser, chaque fois la traverser tout entière ?" Henri Michaux
Donc, descendre du Metro-North Railroad à Beacon – il filera sans vous vers Poughkeepsie : à quoi peut bien ressembler Poughkeepsie ? – et suivre à pied la signalétique, discrète mais présente Dia:Beacon et cette façon de l’écrire, toujours. Se dire qu’il y aura bien une cheminée d’usine pour guider le regard puisque le musée que l’on cherche avait été autrefois une usine. D’abord, à voir, il y a juste l’Hudson, toujours là, les rails au bord tout au bord du fleuve (sur lesquels on est passé, il y a quoi ? à peine un quart d’heure), et le bâtiment de briques dont on commence à penser que ce peut être là.
Finalement, à l’approche, une cheminée apparaît, mais plus loin, pas accolée à l’ancienne imprimerie de boîtes de biscuits devenue musée d’art contemporain. De la brique, de grandes fenêtres latérales et des sheds qui font tomber la lumière sur les établis ; avant même d’atteindre l’édifice si bien marié au paysage l’évidence que l’on ne regrettera pas d’avoir prélevé une journée sur la semaine new-yorkaise pour venir jusqu’ici.
Le billet d’entrée, on l’a, combiné à celui du train aller et retour depuis Grand Central, le tout pour 31,50$, une affaire. Le musée s’impose d’abord par son jardin, jardin sans limites matérialisées et qui descend jusqu’aux rails, gagne le paysage ferroviaire.
Jardin de savante composition, aux installations sonores et olfactives, à la géométrie douce. Jardin à rêver longtemps qui a lui seul, déjà, justifierait le voyage.
Ici tout est beau, dehors, dedans,
les murs, les fenêtres, les toits
je ne peux pas tout montrer. De l’intérieur je vous donne juste deux toutes petites idées.
Mais sachez que ces vastes espaces sont idéalement habités par les oeuvres de Louise Bourgeois (se surprendre à caresser l’araignée la plus impressionnante de toute la création, s’en faire la proie), Richard Serra (marcher infiniment en ses ellipses), Sol Lewitt, les Becher, Agnes Martin, Donald Judd, Robert Ryman, Blinky Palermo, Imi Knoebel, Robert Smithson, On Kamara, Joseph Beuys, Dan Flavin, et forcément j’en oublie…
Retour silencieux vers la gare après avoir résisté à la tentation du grand livre trop lourd à rapporter (on le commandera) ; soirée en ville.
Agréable visite qui se “mérite” après cette escapade en train : et il n’y a pas la foule, style expo Munch en ce moment à Paris où l’on fait paradoxalement tapisserie (j’attends que tout cela s’écluse).
J’aime les musées à l’architecture moderne (comme la fondation Maeght) et il était normal que vous rencontriez l’”universelle aragne” de Louise Bourgeois qui, un temps, défia les visiteurs dans le hall de Beaubourg.
Il est toujours rassurant de voir que les Américains ne sont pas que des guerriers (même si leur départ d’Irak semble maintenant fixé), mais qu’il y a toujours parmi eux des poètes, des peintres, des musiciens, des sculpteurs (au masculin et au féminin) qui savent donner une autre dimension à l’existence.
Merci pour avoir été ce guide.