le blog de Martine Sonnet – ISSN : 2267-8735
"Le problème de la nuit reste entier. Comment la traverser, chaque fois la traverser tout entière ?" Henri Michaux
Dans ce pays, faire sauter les crêpes n’amusait plus grand monde, alors on avait essayé autre chose : faire sauter les enfants. Le représentant avait parcouru les villages et son carnet de commandes s’était rempli aussi vite que celui du représentant en vérandas. Un collègue croisé régulièrement sur les départementales comme aux soirées étapes VRP des hôtels 2 *. Ils comparaient leurs conquêtes du jour devant leurs îles flottantes figées (les blancs battus en neige comme caoutchoutés, à la longue, dans la vitrine réfrigérée, et la crème anglaise elle-même coagulée à l’épreuve du froid). Les facilités de paiement facilitaient les choses, surtout pour les vérandas. Les voisins se donnaient le mot et une fois équipés se félicitaient de leurs acquisitions, du fond de leurs fauteuils en tek spécial salon de véranda – en promotion à l’hypermarché du coin qui avait tout compris. Ils regardaient au travers des doubles vitrages et des filets de protection des trempolines sauter leurs enfants et les restes du paysage.
ce pays, est-ce bien le nôtre ? Je me faisais le même genre de réflexion en regardant les décorations de Noël qui ornent (ornent ?) nos rues, avec ce genre de lumières dégoulinantes, carnets de commande et cadeaux d’entreprise à l’avenant,toutes les rues semblables et ressemblantes mais quelque chose de la liberté, toujours et encore, recluse, enclose, forclose même par le stéréotype… ce pays, est-ce bien le nôtre… ?