le blog de Martine Sonnet – ISSN : 2267-8735
"Le problème de la nuit reste entier. Comment la traverser, chaque fois la traverser tout entière ?" Henri Michaux
Tuyauterie de la gare. A vrai dire je ne pensais pas que j’en parlerais, même s’il allait de soi que des tuyaux circulaient aussi dans la gare : colonnes montantes, eau potable, circuits d’eau chaude, d’eau froide, colonnes évacuant des eaux usées d’usagers, descentes de gouttières avec réceptacles pour eaux pluviales ou résultant de la fonte des neiges. Conduits qui s’imposent assez naturellement à l’esprit dès lors qu’on y réfléchit un peu, sans être plombier pour autant et pour s’en tenir à ceux qui acheminent autre chose que du vent. Mais leur évocation s’imposait avec moins d’évidence que si j’avais entrepris de décortiquer le Centre national d’art et de culture Georges-Pompidou, autrement dit Beaubourg, en lieu et place de la gare Montparnasse. Edifice recevant lui aussi du public, mais se contentant de tuyaux moins spectaculaires et qui se laisseraient même oublier, si l’on en excepte ceux qu’on a jugé utile – ou décoratif, je ne sais pas et à qui demander ? – de peindre d’un vert assez franc pour bousculer le gris gare. Du jour où j’ai posé les yeux sur leurs volutes et bouquets, comme sur leurs ramifications, tous les autres, même les plus discrets, fondus dans le paysage, ont forcé mon champ de vision et avec eux la dimension intestine obligée de la gare.
Extension de la gare. Un peu tirée par les cheveux sous le bonnet de bain obligatoire jusqu’à la piscine Blomet – en cas de fermeture, se rabattre sur la piscine Aspirant Dunant, face à la mairie du XIVe arrondissement ou, en dernier choix, sur celle du centre commercial du pied de la tour, Armand Massard, aux effluves de Javel qui étourdissent le marcheur longeant le C&A. Mais, à Dunand comme à Massard, déplaisir de bassins trop courts et de cabines mal commodes, avec dépôt obligé des vêtements tassés en boule dans un casier consigne trop petit surtout l’hiver avec les manteaux, les écharpes, les bonnets et les moufles. A Blomet, chacun ses affaires pendues dans son petit chez soi carré le temps de nager de vraies belles longueurs dignes de ce nom dans un bassin de 50 mètres. C’est pour cela qu’avec les collègues du bureau du dessus des voies nous l’avions choisie ; régénération dans ses eaux bienvenue à l’heure du déjeuner. Piscine gagnée à pied, en longeant d’abord le chantier du NOVOTEL – au bar duquel il nous arrivera plus tard, travaux achevés, de boire le café au sortir du restaurant inter-entreprises – avant de descendre la longue rue des Volontaires jusqu’à ce qu’elle croise la rue Blomet. Nous allions nager en formation interdisciplinaire SHS, notre Mission voulait cela, mais les deux économistes étaient, et de loin, les meilleurs nageurs (le plus jeune était aussi, par ailleurs, pianiste de jazz).
Votre samedi matin fait écho au(x) mien(s). D’un coup, me paraît évidente et naturelle l’efficacité natatoire supérieure des économistes sur d’éventuels écrivains, qui à la piscine (si j’en juge par moi-même) soignent plutôt leur goût immodéré pour les longueurs.
PhA, je crois bien que les économistes mènent le monde, et pas seulement à la piscine, mais il me semblait que l’élément liquide vous allait bien aussi…
mais au fond, l’extension de la gare s’exerce autant dans l’espace que le temps, et cet aspirant-là, avec son square, ce Blomet ou cet Armand Massard, voilà bien une géographie parisienne qu’il faudrait élucider : qui sont donc tous ces gens, tout comme les 5 lycéens martyrs et tant d’autres… Je me perds un peu en conjectures, le territoire, les noms et les personnes : pfff…
Comment fais tu Martine ???? je lisais le début de ton texte .. et puis, ai regardé la photo et pensé le mot piscine … avant de lire la suite … ton œil me sidère … tes mots pour le dire sont si précis …Merci pour le partage de ton travail d écriture qui inépuisablement fait écho à des observations inconscientes et non subjectives
Bonne soirée à toi
Merci Mariedom, mais bien incapable de dire ce que je fais à part ouvrir les yeux…
Bonne soirée à toi également
ai pensé “non, pas les canalisations !” sujet sensible chez moi depuis deux jours, et puis les mots et la piscine m’ont ragaillardie
Brigetoun, toutes mes excuses rétrospectives pour avoir touché un point sensible…