le blog de Martine Sonnet – ISSN : 2267-8735
"Le problème de la nuit reste entier. Comment la traverser, chaque fois la traverser tout entière ?" Henri Michaux
Longtemps un simple “au-revoir” a accompagné au quotidien nos séparations. Pour les grandes occasions et autres fins de joies collectives (à fuir) il y avait cette chanson tire-larmes disant que ce n’était qu’un au-revoir mes frères etc. et nous regardions de travers ceux qui usaient du grandiloquent “adieu”. Et puis est venu le temps du “à bientôt” : on commençait à ne plus supporter de se séparer sans fixer un terme à la séparation. Le “à bientôt” s’est dit et écrit partout, dans toutes les formes de congés que l’on prenait les uns des autres. Mais “bientôt” c’était encore un peu loin, alors s’est imposé, avec la même universalité des supports, le “à très bientôt”, plus rassurant. J’ai constaté, ces derniers temps, que le “à très vite” qui rapproche encore le terme des retrouvailles progresse à grand pas. “A très vite” permet de partir chacun de son côté tout en restant quelque part attaché à l’autre (un peu le principe de la balle de jokari au bout de son élastique qu’on ne risque pas de perdre). Je me demande de quoi nous avons tellement peur à chaque fois que nous nous quittons et quelle sera la prochaine formule qui exprimera l’insupportable de toute séparation, fût-elle la plus brève. Deviendrions-nous une espèce de plus en plus grégaire ?
Oui Martine, c’est bien vu. Il a aussi le simple “A+” que je me suis toujours refusé à utiliser.
Ceci dit, beaucoup d’autres “choses” sont en glissade progressive.
Il y a aussi le “à tout bientôt” qui est si mignon (probablement issu de quelque région profonde (comme on dit maintenant, laissant aux orties la “province” qui avait le courage de sa domination) (d’ailleurs, j’aime assez le “comme on dit maintenant” qui a quelque résurgence, avez-vous remarqué, Employée ? Il en est un peu de même pour le “à l’ancienne” que j’aime beaucoup aussi)(il y a aussi le “on s’appelle” qui annonce certainement un oubli qui peut, en certains cas qu’on ne calcule que rarement, devenir éternel); on a l’occasion d’ouïr aussi des italianisants “à ciao” qui fleurent assez leur “Canal Plus” (cette odeur assez abjecte (sans doute ontologique) de la complaisance qui s’exerce souvent dans l’étrange lucarne), ainsi que des “à plus” qui tentent un raccourci d’assez bon aloi (on avait droit aussi, parfois, à “bye bye”, mais “ça ne se dit plus” (hein)) (on peut aussi combiner). Il faut bien qu’en se séparant, nous actions (du verbe acter) nos actions (car, comme on sait, il nous faut à tout instant dans la conversation, user des redites pour nous faire comprendre) : il y a aussi, dans ce registre, le “bisous bisou” qu’on dit au lieu de le(s) faire (nous en sommes alors quittes)(c’est peut-être tant mieux ?), car enfin, cette grégarité (ça se dit ?) n’est-elle pas simplement l’une de nos malheureuses conditions ? Bon, allez, à la prochaine…!
… à tout’ ? on est si pressés, et d’ailleurs surtout comme des citrons !temps de rien, même pas de finir mots ou expressions
Belles observations…
Il y a aussi : “Donne-moi ton 06 !…”
Et le “On se SMS…” n’est-il pas encore inventé ?
En effet, sans y penser, on a opéré par glissements successifs et, en y pensant, je m’entends accompagner mon “Ciao, ciao” d’un geste de la main…