le blog de Martine Sonnet – ISSN : 2267-8735
"Le problème de la nuit reste entier. Comment la traverser, chaque fois la traverser tout entière ?" Henri Michaux
Relevé archéologique dans la gare. Ce quadrilataire incertain au sol du hall principal, niveau parvis, côté Pier Import : trace résiduelle du kiosque de la Loterie nationale (puis Française des jeux) longtemps édifié dans ces parages ? J’ai trop fouillé de fonds de cabanes néolithiques et de campements magdaléniens pour ne pas me poser la question. Mais ici ni lit de galets, ni trous de poteaux, ni vestige fugace comme un ticket, même perdant, ayant échappé à la vigilance des robots nettoyeurs et qui permettrait d’envisager une datation. Investigation nécessaire, parce que ce kiosque, dont je n’ai jamais eu l’usage, je ne saurais dire quand il a disparu. Chaque vendredi 13, chaque mercredi et chaque samedi à dater de l’invention du loto s’en dévidaient d’impressionnantes files humaines, espérantes et désespérées à la fois. Longueur et fébrilité de la file d’attente inversement proportionnelles au chemin que les aiguilles des horloges avaient encore à parcourir sur leurs cadrans pour atteindre le fatidique 19 qui sonnerait l’arrêt des validations. Je me demande s’il arriva un jour qu’un usager, descendu de son train pauvre comme Job, sa transaction conclue avec le kiosquier soit sorti de la gare riche comme Crésus, mais l’ignorant encore. Et ce qu’il advint de lui et de sa bonne ou mauvaise fortune par la suite.
Calculs de probabilités à effectuer sur le terrain (l’usage de la calculette type collège est autorisé). Probabilité qu’un voyageur régulier des voies 10 à 17 gagne la super cagnotte du Loto du prochain vendredi 13. Probabilité que tous les trains attendus en gare principale comme en gare de Montparnasse-Vaugirard un jour ouvrable, qui reste à définir, arrivent à l’heure. Probabilité qu’un jour J à un instant T toutes les valises à roulettes présentes dans la gare s’immobilisent, cessant enfin leur raffut. Probabilité que le fantôme d’Harold Lloyd soit suspendu, invisible, aux aiguilles de l’une des horloges de façade, côté – Arrivées ou Départs – indifférent, pour multiplier ses chances par deux. Probabilité que la voix féminine mécanique copiée collée de la gare se mette à chanter La voix humaine de Francis Poulenc suite à une incivilité facétieuse. Probabilité que le chef de gare m’attende un matin au bout de la voie 14, bouquet de fleurs à la main, et me remercie pour mes bons et loyaux services de défense et illustration de son lieu de travail. Probabilité que deux lecteurs fidèles de Montparnasse Monde se croisent dans la gare, par effet heureux du hasard – objectif ou pas – se reconnaissent et clignent de l’œil.
Promis : le prochain clin d’oeil échangé auquel j’assisterai dans les espaces de Montparnasse aura droit à une interprétation toute bienveillante.
Comment était-ce déjà ce film du type qui trouve un journal du lendemain, joue aux courses etc etc…? Qui me fait me souvenir de Alan Ladd, je crois bien, qui jouait à celui qui avait trouvé le tissu intachable et inusable, non ? Un peu comme ces gens qui vont jouant à la loterie, Gueules cassées à présent simplement grattage (Alan Ladd non… Fred Astair ? Non plus… Ah la mémoire…)
Il s’agit du film “C’est arrivé demain” (It happened tomorrow) réalisé aux USA en 1944 par le français René Clair… avec Dick Powell et Linda Darnell.
Excellent film que je me rappelle avoir vu au défunt “Républic-Cinémas” du 18 rue du Faubourg du Temple !
Yes ! Excellent, je ne sais pas… Mais Linda, ah… Et le Republic Cinéma, vous ne le savez pas Philéon92, mais il s’agit du premier cinéma parisien où je fus, début septembre 72 voyez, pour y voir “Il Etait Une Fois dans l’Ouest” (il me semble qu’il devint ensuite un des Action)
A découvrir si vous ne connaissez pas, le blog salles de cinéma de Phileon92, qui en connaît un rayon sur la question
Si si je le connais, vous vous souvenez, le balcon du Cujas ? Très bien
Puisque Martine a la gentillesse de citer mon blog, j’en profite pour signaler que je viens justement d’y rédiger un article sur la (longue) carrière du cinéma du 18 de la rue du Faubourg-du-Temple, qui fut effectivement pendant un temps une salle du circuit Action (vous avez raison, PdB !)
Par contre, à ma connaissance il n’y avait pas de balcon au Cujas, devenu aujourd’hui l’Accatone… en grandes difficultés financières, au passage… !
Le balcon en question était celui du cinéma du Panthéon si ma mémoire est bonne
Dans le quartier, il y a aussi le petit balcon du Logos 1…
je me suis planté, c’est au Panthéon (en même temps, c’est juste à 20 mètres aussi…) et Philéon oui, je l’ai lu l’article, je suis allé voir le site des action etcetc… intéressant tout ça, bravo…!
Très Perecquienne la fin de ce billet, “j’aime” comme on dit sur les sites de réseaux sociaux.