le blog de Martine Sonnet – ISSN : 2267-8735
"Le problème de la nuit reste entier. Comment la traverser, chaque fois la traverser tout entière ?" Henri Michaux
Avant de refermer définitivement la porte de la pièce 2071, méticuleusement nettoyée de toute scorie de ma présence, j’ai photographié à plusieurs reprises, par ciels différents, la vue sur le jardin. En particulier cette façade, longue enfilade continue de fenêtres d’appartements – cuisines et séjours alternés – à laquelle il conviendrait d’apposer une abscisse et une ordonnée pour s’y repérer plus commodément dans les vies derrière les vitres. Parce que les éléments mobiliers qui en brossent le décor manquent de signes distinctifs : étagères, dos de canapés, dos de bureaux avec ordinateurs, lampes, plantes vertes, robinetteries d’éviers, plans de travail culinaires, électroménager standard. On pourrait faire aussi la somme des vies rassemblées là, calculer la moyenne d’âge, un niveau médian de ressources, des écarts types, déciles et quartiles, et établir la répartition des habitants par niveaux de diplômes ou Catégories Socio-Professionnelles (CSP). La façade invite à la statistique, toutes choses égalées d’ailleurs par son caractère parfaitement lisse.
Si j’ai quitté ce bureau du dessus des voies, pourtant si harmonieusement environné, c’est qu’après le dernier pique-nique entre collègues au jardin Atlantique en juillet 2006, tout a basculé très vite. Ce midi-là, tous ensemble installés au calme, à l’écart de tout passage, dos caressés par les roses trémières. C’était le dernier pique-nique avec lui et nous le savions bien. Juste trois ans plus tôt, une fois compris ce qu’on appelait « place des Cinq martyrs du lycée Buffon » et arrivée là en contournant bêtement toute la gare par les boulevards de Vaugirard et Pasteur – je ne savais pas encore pour le jardin -, franchissant la porte de son bureau pour l’entretien d’embauche j’avais immédiatement repéré le casque de vélo, l’affiche du Caro diario de Nanni Moretti et le tableau au mur représentant les voies vues du pont. Compris, du coup, que la rencontre serait de celles qui comptent. Plus tard je saurai aussi que le peintre, c’était sa mère.
vie en infini quadrillé cadrillé (je ne sais plus l’écrire)
qui n’invite pas trop à danser le quadrille
N’y a-t-il pas aussi dans ces lignes comme les voies de chemins de fer situées en dessous ? Voilà pourquoi je me disais que cette vue me disait quelque chose : c’est que je fus dans un de ces appartements, cela me revient à présent c’était en 90 mais j’ai oublié le nom de ce brave homme qui me reçut, son divan (où je ne fus point) tournait le dos aux fenêtres et son fauteuil à la tête de ce meuble se tenait non loin de ces baies que vous montrez ici (d’ailleurs difficile de dire si cette façade regarde l’ouest ou l’est… Quant à lui, il vivait côté rue Pasteur je crois que c’est ainsi que se nomme cette rue avec le musée de la Poste et les arrêts de bus.
PdB, quelque chose ne va pas : la façade montrée est celle sur le jardin d’un immeuble donnant aussi côté Mouchotte, le musée de la Poste est situé au contraire sur le boulevard de Vaugirard, si le divan était bien dans l’immeuble en question et si son propriétaire vivait côté Pasteur/Vaugirard, de deux choses l’une : votre mémoire vous trompe et ce n’est pas dans cet immeuble que vous êtes allé, ou bien l’analyste n’exerçait pas à son domicile
Oui, voilà, c’est ça. Il y a un truc que l’employée aux écritures ignorait mais le voici : de perspective dans mon esprit, point n’est question (je suis depuis onze lustres borgne). Donc à gauche de votre image, est-ce la tour Montparnasse (que je crois apercevoir, cependant) ou est-ce le sud ? Si c’est le sud, l’homme aux cheveux blancs accueillant et compréhensif (bienveillant mais neutre…) y vivait (au 5° si mes souvenirs sont ce qu’ils sont – c’est juste ce qu’ils sont); sinon, c’est en face… (ce n’est pas la rue Pasteur – ça n’existe pas, ça, c’est le boulevard, je crois- , mais le boulevard de Vaugirard…)
le sud (on dirait le sud…) je ne saurais trop vous dire : pas le sens de l’orientation assez développé, mais ce qui est sûr c’est qu’on aperçoit l’ombre de la tour et l’ombre de l’immeuble de bureaux perpendiculaire à ma façade d’appart et que de la fenêtre de mon bureau dans le rond donnant côté jardin et non côté voies, cette façade était à droite ; la parallèle en face, côté bd de Vaugirard, que des bureaux et pas d’apparts (à ma connaissance)
Alors j’en conclue que je me suis planté et qu’il devait habiter de ce côté-ci de la gare (côté hôtel Méridien) alors voilà
L’anonymat de façade… invite toujours à chercher le nom qui se cache derrière (c’est la marque des commentaires, en majorité, sur les blogs ou sites Internet).
Mais là, sur votre photo, il y a effectivement des perspectives, ce qui n’est pas forcément le cas ailleurs !
tiens, tiens Dominique, comme on se croise, le petit vélo bleu ne doit pas être loin
http://dominiquehasselmann.blog.lemonde.fr/2009/02/20/petit-velo-rue-des-tournelles/
Comme d’immenses lucarnes ouvertes sur notre vide intérieur, riche de nos constructions d’expériences vécues.