L'employée aux écritures

le blog de Martine Sonnet – ISSN : 2267-8735

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"Le problème de la nuit reste entier. Comment la traverser, chaque fois la traverser tout entière ?" Henri Michaux

Rêve aux chaussures noires

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Posted by ms on 20 juin 2010 at 14:13

Jeudi dernier en début d’après-midi, comme je marchais sur l’esplanade de la BnF pour rejoindre la table ronde qui nous attendait, spécialistes de l’autobiographie, de la conservation ou du suivi des traces et blogueuses difficiles à suivre, le rêve de la nuit passée m’est revenu en conscience.

Je marchais rigoureusement sur les lattes, ayant choisi de me tenir à mon axe de traverse le plus longtemps possible pour, abordant l’esplanade par l’Ouest, me glisser dans les entrailles de la bibliothèque par le soupirail Est. Deux pas sur une latte puis trois sur la suivante, le troisième légèrement freiné pour ne pas mordre sur le raccord, et l’oreille attentive à la résonnance du vide qu’on devine sous le revêtement du bois rare (revêtu lui même d’un complexe réseau de bandelettes antidérapantes et autres reliefs signifiants).

Je portais mes chaussures noires les plus récentes, achetées quelques jours avant mon faux départ à Dublin (un projet de voyage réduit en cendres) en pensant qu’elles résisteraient mieux à la pluie irlandaise que ma vieille paire spongieuse. Chaussures que je ne porte encore que rarement : je les trouve belles et ne veux pas les abîmer trop vite. Donc je marchais écoutant mes pas et contemplative de leur élégance, quand le rêve m’a rattrapée.

Mes chaussures noires en étaient l’objet. Dans le rêve comme dans la réalité, aussitôt qu’achetées,  je les avais portées chez le cordonnier à l’ancienne (ni duplicateur de clefs, ni plastificateur de documents précieux entre deux ressemelages) à échoppe proche de la gare pour qu’il en protège la semelle – exceptionnellement pas en crêpe caoutchouteux et rebondissant comme celles de mes souliers habituels.

Mais mon souci dans le rêve était de trouver après cela un deuxième cordonnier que je puisse convaincre de superposer à la première une seconde épaisseur de revêtement protecteur. Je ne voulais pas vexer le premier en lui demandant à lui de coller cette deuxième couche – il aurait pu en déduire que je n’étais pas contente de sa première intervention – mais tous ceux à qui je demandais ce service estimaient que le travail avait été bien fait et refusaient. Je cherchais donc un cordonnier moins respectueux de ses collègues ; quête d’autant plus désespérée que je ne comptais pas me contenter de deux épaisseurs…

Et avançant sur l’esplanade, je m’interrogeais sur cette idée fixe du rêve, m’isoler le plus possible du sol, alors l’histoire de la princesse au petit pois m’est revenue avec l’incrédulité absolue qu’elle suscitait en moi quand j’étais petite. La crainte du gravier sensible sous ma semelle substituée à celle du petit pois sous les 20 matelas. Aussi irrationnelle.

NB : Les petits pois sont une des spécialités de la ville dans laquelle j’habite et si leur culture a cessé on continue à les fêter chaque année en juin.

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5 Comments

  • On 20 juin 2010 at 21:32 petite racine said

    Pour avoir fait récemment un inventaire assez systématique, je dirais qu’il apparait clairement que les pieds sont les personnages principaux, récurrents, obsessionnels des rêves. Avec ou sans petits pois. Chez moi, assez souvent cousus (lacet traversant la peau sans chaussure), et déambulant sans trêve.

    http://www.publie.net/tnc/spip.php?article298

  • On 20 juin 2010 at 22:51 PdB said

    Employée aux bois rares, il me semble que les petits pois (verts) et les petits pois (blancs) antidérapants ont quelque chose à voir (il en faudrait des rouges, on se retrouverait en Italie…) (je ne parle même pas des “réseaux”…) (si votre dublinesque périple a été annulé, mon barcelonesque itou et du fait du même volcan : hier, un mail de la compagnie aérienne m’a informé du remboursement de mon billet – intégralement, je vous informe) (je me permets une incise personnelle dans le sens où la fête du petit pois clamartesque est tombée, cette année, sur mon anniversaire, ce qui est un coup de chance) (décidément, cette année est fertile en coincidences)

  • On 21 juin 2010 at 7:44 PhA said

    Ne pas se laisser entamer par la pesanteur.

  • On 21 juin 2010 at 8:58 ms said

    @petite racine : parole d’experte en effet

    @PdB le petit pois au singulier est rarement d’humeur festive, ils se fêtent donc au pluriel (comme votre anniversaire que vous préférez sans doute fêter à plusieurs en mangeant autre chose que des petits pois) ; si vous venez ici parler de la fête “du” petit pois, on verra tout de suite que vous êtes d’ailleurs

    @PhA il y a des lois contres lesquels même les meilleurs chausseurs sachant chausser (j’en ai connu un qui s’appelait André) ne peuvent rien

  • On 22 juin 2010 at 22:18 PdB said

    @ l’Employée aux petits pois : loin de moi l’idée (saugrenue, vous en conviendrez) de me faire passer pour clamartien (au mieux, clamortophile… et encore…) alors que je suis, depuis bientôt 20 ans, de Belleville… (on a sa fierté, malgré tout)

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