L'employée aux écritures

le blog de Martine Sonnet – ISSN : 2267-8735

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"Le problème de la nuit reste entier. Comment la traverser, chaque fois la traverser tout entière ?" Henri Michaux

Je me souviens de P.O.L.

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Je me souviens qu’en avril 1978 j’avais acheté Je me souviens de Georges Perec – sous titre : Les choses communes I – dans la “collection dirigée par Paul Otchakovsky-Laurens” d’Hachette littérature. Achevé d’imprimé en date du 2 janvier 1978 : 40 ans tout rond. Triplement (au moins) fascinée par le principe du livre, son index et les pages blanches offertes en fin de volume à nos propres Je me souviens. En septembre 1978 (je datais à l’époque mes achats en haut de page de garde) j’achetais La vie mode d’emploi – sous titre : Romans – du même auteur dans la même collection aux bons soins du même directeur. C’est comme cela que le nom de Paul Otchakovsky-Laurens m’est devenu familier, avant qu’il ne s’abrège en P.O.L. sur la couverture même des livres qu’il éditait et qui n’en finiraient plus de faire mes bonheurs de lecture.

En ces premiers jours de janvier alors que, comme tant de lectrices et lecteurs fidèles à ses trois initiales, sa disparition m’attriste, je me souviens aussi qu’en 2007 Paul Otchakovsky-Laurens faisait partie des dix-neuf éditeurs à qui j’envoyais par la poste le manuscrit de mon Atelier 62. Le livre accepté à l’été 2007 par Le temps qu’il fait qui le publierait en janvier 2008 – juste 10 ans – je récupérais les quelques exemplaires du manuscrit demeurés en lecture. J’étais ainsi passée chez P.O.L. où la personne très aimable de l’accueil qui était allée le chercher dans un bureau (son bureau ?) était revenue me le tendre en me disant : “c’est dommage, il avait passé la première sélection, il était en relecture”. Mais je manquais alors de patience pour ce texte trop longtemps étouffé.

Et je constate aujourd’hui, repensant à tout cela, que des dix-neuf éditeurs qui avaient reçu le manuscrit, Paul Otchakovsky-Laurens est le cinquième que nous perdons puisque je l’avais aussi adressé à J.B.Pontalis, à Maurice Nadeau, à Jean-Marc Roberts et à Gérard Bobillier qui l’avaient refusé.

Mais pas P.O.L. ou, du moins, pas d’emblée : qui saura jamais ?

Filed under coin lecture, à chaud

Sophie Calle orpheline tout à fait

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Au musée de la Chasse et de la nature (où je n’avais jamais mis les pieds) se tient jusqu’au 11 février prochain l’exposition Beau doublé, Monsieur le marquis !, confiant ses étonnantes collections aux bons soins de Sophie Calle et de son invitée la sculptrice Serena Carone. C’était bien la première fois que si j’avais été détentrice d’un permis de chasse j’aurais bénéficié du tarif réduit pour visiter une exposition - aucun regret pour autant de n’avoir pu m’en prévaloir à la caisse. Ce n’était pas la première fois en revanche que je visitais une exposition de Sophie Calle en me disant qu’il fallait absolument que L’employée aux écritures en parle. Forts souvenirs de Prenez soin de vous dans la salle des Imprimés de la chère vieille BN de la rue de Richelieu (qui avait donné matière à l’un des tous premiers billets de ce blog), comme de l’installation RACHEL MONIQUE au Palais de Tokyo également évoquée. D’ailleurs Monique la girafe a fait le voyage de l’atelier de l’artiste au musée de la Chasse comme elle l’avait fait au Palais de Tokyo. Retrouvailles.

L’exposition actuelle ne saurait se voir sans raviver l’empreinte de RACHEL MONIQUE parce que, comme la mère de l’artiste, en sa fin même, habitait cette installation, l’une des salles de Beau doublé, Monsieur le marquis ! respire des ultimes souffles de Bob, son père, de derniers mots possibles, suspendus, en dernier mot point final. Et au bouquet de soucis que la fille tendait à sa MOTHER se substituent trois reines marguerites pour son FATHER.

De ses contacts proches qui ne répondent plus, mère, père et tant d’autres cisaillés du fil des ans, de ses adresses à effacer dans ses agendas et autres répertoires, Sophie Calle ne sait pas trop quoi faire, cherche la méthode, nous consulte,

finit par nous poser directement la question, ouvrant un livre blanc dont elle nous invite à couvrir les pages,

moi j’ai répondu : “Je les écris pour les partager avec vous”.

Quant à ce que Sophie Calle et Serena Carone ont astucieusement éparpillé dans les autres salles du musée, je vous laisse les surprises. Juste souligner le bonheur de réemboîter le pas de la Suite vénitienne, de retrouver là, sorties du livre (un de mes livres de chevet), Des histoires vraies et combien il y aurait à dire à propos des textes de l’installation Le Chasseur français, saisissant survol, de décennie en décennie, de 120 ans de petites annonces d’hommes à l’affût. Profitez comme moi de la nocturne du mercredi : excellentes conditions pour visiter tranquillement en prenant le temps de tout lire.

Ma collection d’araignées (avec voeux)

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La semaine dernière, visitant la réjouissante exposition Women House à la Monnaie de Paris (à voir jusqu’au 28 janvier), j’ai pu ajouter une araignée, façon Louise Bourgeois, donc maternelle, à ma collection. Une araignée du soir puisque je profitais de la nocturne du jeudi.

Elle a rejoint celle, de plein midi, soleil de juillet à la verticale, que j’avais délicatement attrapée à Bilbao,

celles collées au mur du Whitney, abritées du jour,

et celle tapie à Beacon, à la DIA Foundation.

Cela m’en fait donc cinq et je guette la prochaine, impatiente d’enrichir ma collection. Mes araignées toutes de bienveillance et moi vous souhaitons une heureuse année 2018.

Mes vacances avec les Rougon-Macquart : clap de fin

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Cinq ans maintenant que chaque période de vacances, quelle qu’en soit la durée, la saison et la latitude (ce dernier paramètre variant nettement moins que les deux autres) m’était occasion d’avancer dans une intégrale Rougon-Macquart que les présents congés de Noël m’ont vue achever avant-hier. En matière de lecture des oeuvres d’Emile Zola, les cinq décennies précédentes ne m’avaient fait ouvrir, sur injonction scolaire, que trois romans : Au bonheur des dames, La Bête humaine et L’Assommoir. Je m’en étais contentée au double sens du terme : passant de bons moments à ces lectures je n’en avais pas, pour autant, cherché à éclairer les tenants et les aboutissants de “l’histoire naturelle et sociale d’une famille sous le Second Empire” en reliant ces volumes aux autres de la série. Même si je m’étais bien un temps demandé ce qu’il adviendrait de la fille de Gervaise.

Je suis revenue à Zola en 2010, d’abord par la relecture de L’Assommoir quand j’écrivais mes Repasseuses pour France Culture (bon souvenir que ces commandes pour les Passagers de la nuit de Thomas Baumgartner) juxtaposée à la lecture des passionnants Carnets d’enquêtes de Zola présentés par Henri Mitterand dans la collection “Terre humaine”. Si je collectais bien dans le roman comme dans son substrat documentaire ce que j’y cherchais à propos des blanchisseuses et du repassage, je m’émerveillais par ailleurs de l’acuité du regard porté par Zola sur son Paris. M’en ouvrant à l’un de mes collègues spécialiste de l’histoire culturelle du XIXe siècle, celui-ci me conseillait de me plonger dans le Paris, dernier volume du cycle des Trois villes écrit après les Rougon-Macquart. Conquise par cette redécouverte de Zola, j’enchaînais illico avec les deux autres villes, Lourdes et Rome – en sautant toutefois dans ce dernier opus quelques descriptions un peu longuettes de vues panoramiques sur la ville éternelle.

Après quoi je m’attaquais aux Rougon-Macquart, décidée cette fois à n’en laisser échapper aucun, en intégrant systématiquement au moins un à mes bagages lectures de vacances. En repartant du début, de La Fortune des Rougon, mais ensuite au gré des approvisionnements possibles à la bibliothèque du quartier ou dans les poches d’occasion chez Gibert quand je m’en mettais en quête avant un départ pour Céaucé, Molines, Veules-les-Roses ou Leysin. Et voilà comment j’en termine en ces quelques jours de congés par La Débâcle : je répare un oubli après m’être crue arrivée au bout l’été dernier en Suisse avec Le Docteur Pascal. Si mes préférés ont été les romans parisiens (L’Argent, Pot-Bouille, Le Ventre de Paris notamment), j’ai pris plaisir à les lire tous, et si parfois l’ennui pointait (comme avec l’abbé Mouret ou le déjà nommé docteur) je forçais la marche. Au bout du compte, terriblement impressionnée par le savoir-faire de Zola !

Comme cette lecture étalée sur cinq ans a été quelque peu décousue, je m’étais fait un pense-bête généalogique Rougon-Macquart dont je vous fais volontiers profiter au cas où vous vous lanceriez dans la même intégrale. Pour ma part maintenant j’ai bien envie de jeter un oeil (au moins) sur l’étude de Frédérique Girard, Emile Zola, le déclassement et la lutte des places : les Rougon-Macquart, condensation littéraire d’un désir d’ascension sociale, et puis de voir un maximum d’adaptations cinématographiques des romans du cycle.

Quant à mes prochaines vacances, quittant Emile pour Honoré, j’irai compléter quelques autres de mes lacunes du côté du dix-neuvième siècle.

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Poétique de la voirie (8)

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palette rouge palette bleue

à crans

enlacées

à la vie à la mort

Montparnasse monde mis à nu

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La gare nouvelle qu’ils nous fabriquent – puisque toujours ils nous disent “votre gare ceci” “votre gare cela” voulant nous faire oublier notre pauvre condition d’usagers non propriétaires – commence par la mise à nu de l’ancienne. Et c’est intéressant quand on s’est toujours posé la question de ce qu’elle pouvait bien avoir dans la peau, sous les écailles céramique dont ils la dépouillent aujourd’hui précautionneusement, travaillant avec filet, côté Mouchotte. Du béton : rien d’étonnnant, élémentaire même mon cher Watson, et j’aurais bien parié que le Montparnasse monde c’était béton et rien d’autre. Parié et perdu. Parce qu’il y a aussi de la brique, et ça c’est une bonne surprise. Je n’imaginais pas la gare s’édifiant, du moins en petite partie, brique après brique, cimentées à la truelle ; fil à plomb régulièrement sorti de la poche pour ne pas rejouer le mauvais tour de Pise. J’aime la brique, j’ai grandi dans la brique et il m’en reste quelque chose, aussi suis-je sensible à ce dessous découvert de la gare. Je ne dirai rien des parpaings conjoncturels jouxtant l’empilement des briques. Ceux-ci ne ressortissent pas – à mon avis – au bâtis originel mais se trouvent là à titre de bouche-trou nécessaire à ce stade des travaux pour interdire le chantier à la curiosité du public. Si tant est que le public, L’employée aux écritures mise à part, soit tenté d’y aller voir.

Pour mémoire : la série  Montparnasse monde existe sur ce blog depuis septembre 2008, le livre Montparnasse monde depuis janvier 2011.

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Poétique de la voirie (7)

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Retenez bien l’adresse

plus dans le pré, mais pas loin, au bout de la rue Notre-Dame-des-Champs. Courez-y (des fois qu’il filerait).

Points en suspension et poussières d’écriture

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J’avoue que ce blog est un peu, à l’image de ce godet, en suspension, ce qui ne vous aura pas échappé si vous croisez habituellement dans les parages. Quand L’employée aux écritures déserte, c’est qu’elle est trop occupée par ailleurs. (Depuis le retour des vacances d’été il s’agissait d’immobilier, affaire en passe d’être réglée, encore que les travaux… refrain connu).

Honnêtement, il manquait aussi sans doute l’envie, mise à mal par les injonctions à écrire comme ci ou comme ça, avec des .e par ci et des .e.s par là rendant ce qui s’écrit imprononçable pour peu d’effets sur la cause. Cause que je soutiens bien évidemment mais en pensant qu’on commencerait par combler les écarts de salaires entre les travailleuses et les travailleurs on y verrait plus clair qu’avec ces rustines collées à tout bout de mots. Pour ce qui est d’user des “celles et ceux” ou de féminiser les intitulés de professions, grades etc, aucune objection de ma part, bien au contraire (à condition qu’on me laisse mon métier de chercheuse sans me transformer en chercheure, après tout j’aurais aussi bien pu être danseuse et non pas danseure). Mais ne demandez pas à L’employée aux écritures d’écrire des .e : une bonne fois pour toutes c’est non. Et je profite de ce billet (puisque je n’en écris pas souvent) pour exprimer l’agacement que me cause chaque courriel reçu adressé à de “Cher.e.s collègues” ou à de “Cher.e.s ami.e.s” envoyant valser mon accent grave. J’y tiens à cet accent grave et j’aimerais mieux que le zèle inclusif se déploie sans écorcher l’intégrité orthographique des unes.

La vraie raison d’être de ce billet, précisément aujourd’hui 1er décembre 2017, est qu’il y a juste dix ans, à l’incitation du petit journal (en deux lignes par jour) collaboratif initié en novembre 2007 par François Bon en son Tiers Livre, j’ouvrais une année – 1er décembre 2007 – 30 novembre 2008 – de courtes notations quotidiennes, reprises et augmentées plus tard de leur index. Compilation toujours lisible d’une année pour moi pas du tout comme les autres.

Filed under la vie tout venant

Il ne se passera rien

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Je vous en réponds. Comptez sur moi. Les débordements et tout ce qui couve, je vous étouffe ça vite fait bien fait.

J’ai tout prévu.

Montparnasse monde rhabillé (juste un essayage)

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Moins concernée par cette gare qu’à l’époque où je travaillais dans un bureau de l’immeuble Nord-Pont situé au-dessus du hall Pasteur, habitais une ville desservie par l’omnibus Sèvres-Rive gauche et disposais d’une résidence secondaire (des plus modeste) accessible (malheureusement sans de quoi franchir les 30 derniers kilomètres) depuis une gare de la ligne Paris-Granville, je reste néanmoins sensible à tout ce qui se passe par là et donc à sa campagne de rénovation annoncée. Sensible et pour ainsi dire moralement tenue d’en rendre compte eu égard à mes antécédents familiaux, personnels et littéraires avec la gare du Montparnasse monde.  Je ne sais pas si les explications du projet de rénovation promises pour septembre sont disponibles à l’intérieur – je n’y suis pas rentrée depuis mon retour de vacances – mais j’ai compris ces jours derniers, allant faire quelques courses à Inno devenu Monoprix, que l’écorchage de façade qui m’avait intriguée avant l’été – pourquoi ces seuls bureaux, ceux-là précisément, côté départ – et fait espérer que leurs occupants avaient été prévenus avant de prendre leur pause estivale, avait valeur de test.

La surface dépecée est désormais revêtue d’un nouvel habillage, verre et matériau indéfinissable, destiné à nous faire oublier tous les carreaux de faïence noire qui n’étaient de longtemps plus remplacés quand ils se décollaient et c’était un crève-coeur. Si le petit plissé qu’ils leur substituent est plus seyant et tombe bien : je vous laisse juge.

Pour mémoire (et il en faudra) : la série  Montparnasse monde existe sur ce blog depuis septembre 2008.

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