L'employée aux écritures

le blog de Martine Sonnet – ISSN : 2267-8735

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"Le problème de la nuit reste entier. Comment la traverser, chaque fois la traverser tout entière ?" Henri Michaux

Poétique chiffrée de la voirie

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Du bitume

les jours de rapiéçage

qu’ils s’ impriment

sous nos semelles molles

je n’y avais jamais pris garde.

Murmure, rues de Porto

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Soit cette image saisie au vol ce début de semaine sur un bout de mur à Porto. Au vol vraiment parce qu’un cyclone dont on apprendrait plus tard qu’il se prénommait Henri commençait à faire des siennes – il irait, d’ailleurs, un peu plus tard dans la journée, jusqu’à me faire acheter une paire de bottes en caoutchouc pour parvenir à atteindre la Casa de Musica et assister au concert pour lequel nous  avions acheté nos places au retour du cimetière d’Agramonte. Soit donc cette image que je reconsidère aujourd’hui au moment de trier les photos de ce court séjour dans une ville d’une épatante vitalité créative. Et je me demande si la composition n’est pas trop belle et trop riche de regards pour résulter d’une succession de collages/arrachages fortuite. Je ne sais plus qu’en penser.

Comme je ne sais trop quoi penser de la juxtaposition dans la rue où nous logions agréablement, rua da Almada, des vitrines fourre-tout des boutiques-ateliers propres à la traditionnelle spécialisation laborieuse de la rue – petite métallerie, plomberie, serrurerie, tuyaux en tous genres et matériaux, électricité – toujours en activité, avec celles, tellement clean, des bars, restaurants, galeries, concepts-stores, agences de com’ ou de design, dans une alternance quasi rigoureuse. Je me demande combien de temps les occupants traditionnels des lieux s’y maintiendront et si la ville, soucieuse de la rénovation de ses anciennes magnifiques maisons, les aide d’une façon ou d’une autre à s’y maintenir. A longer ces vitrines et façades contrastées, naît le sentiment que dans cette rue un serpent se mord un peu la queue : un magasin “nouveau” expose joliment et vend de la vaisselle en tôle émaillée que l’on trouverait sans aucun doute “dans son jus” en fouillant dans l’arrière boutique de l’échoppe d’en face.

Là où Manoel de Oliveira repose (Porto)

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C’est, dans la ville de Porto, au bout d’une courte rue qui porte bien son nom et le portait mieux encore avant, quand elle s’appelait Rua do Cemiterio, mais sans doute que ceux de l’hôtel, seul édifice un peu conséquent dans cette rue sans façons, n’appréciaient guère cette adresse à tête d’enterrement.

Alors on a débaptisé la rue, préféré comme enseigne la Méditation qui laisse entendre qu’on y dort bien. Ce que les occupants du bout ne démentiront pas, eux qui ne font pas qu’y passer et au service desquels fleurit  l’inévitable petit commerce de la dernière heure.

Manoel de Oliveira (1908-2015) repose là, à quelques pas de l’entrée du cimetière d’Agramonte, auprès de quatre des siens, à l’abri d’un toit qui pourrait en abriter un de plus. A moins que Manoel ne soit le dernier : les autres sont là depuis si longtemps. Un homme sans plus de contemporains à force de vivre.

Ce qui surprend un peu, et fait sourire, ce sont les qualités qu’il revendique, pour finir, du haut de ses 106 années accomplies. Cet homme-là, n’allez pas croire qu’il n’y avait que le cinéma qui l’intéressait dans la vie.
Tout autour de lui, la vie rangée des morts suit son cours.
Chacun son petit ménage.
Pour visiteurs, des chats, des mouettes, et nous ce dimanche 13 septembre 2015, juste avant la fermeture à 17h30.

Photogénie d’une flaque

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C’était sur le chemin qui monte au col des Prés de Fromage, au dessus de Molines-en-Queyras,

une petite flaque de rien.

Du nom des choses écrit inutilement sur les choses

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Interloquée hier, dans les toilettes du TGV Est qui m’emmenait visiter le Centre Pompidou de Metz et ses expositions du moment – que je conseille : ce fut une belle journée – , par une précision que la SNCF, son chef de bord, son personnel d’accompagnement et les membres de l’Alliance Rail-Team, ont cru nécessaire d’accoler à un accessoire qui jusque-là, dans les toilettes ferroviaires, s’en passait très bien. Etonnée d’abord qu’un logisticien/signalétiqueur de trains en ait conçu l’idée et que du n+1 de cet employé créatif au Président de la Société Nationale celle-ci ait semblé suffisamment pertinente pour être mise en oeuvre avec attribution du budget idoine. A moins que ledit employé, amateur de littérature sud-américaine, ne l’ait emprunté à ce passage de Cent ans de solitude de Gabriel García Márquez au cours duquel les habitants de Macondo frappés d’un mal étrange leur faisant perdre la mémoire des choses et de leurs usages collent des étiquettes partout pour y remédier. Déconcertée aussi par le vocabulaire choisi, parce que le “papier hygiénique” me semble avoir été détrôné par le “papier toilette” des gondoles de supermarchés et par le “PQ” du langage courant des ménages. Sans compter que si l’on voulait s’en tenir au registre de l’hygiène et user de l’adjectif qui s’y rapporte, il convenait d’inverser le sens de l’accent sur le E. Bref une innovation qui ne m’a pas convaincue et pourtant j’aime les trains.

Filed under la vie tout venant

De la qualité du sommeil selon son éternité ou pas

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Ces temps-ci un homme, pas jeune, vient souvent dormir sur un banc entre contre-allée et boulevard. Il glisse un semblant d’oreiller sous sa tête et pose sur lui une large couverture de laine rose format lit pour deux personnes  dont les pans flottent de chaque côté du banc. Il ne s’enveloppe pas et personne pour le border. Au pied du banc, posés, deux grands sacs plastiques dans lesquels il rangera son attirail une fois son somme fait, avant de disparaître du quartier aussi discrètement qu’il y est apparu. A certaines heures du jour et en fonction de l’ensoleillement, l’homme qui n’est pas remarquable sauf quand il dort sous sa couverture rose, se reflète dans la vitrine de l’une des nombreuses officines de pompes funèbres – j’en compte sept dans un rayon de moins de 5 minutes à pied – ceinturant les deux hôpitaux du quartier. (Profusion d’offre de services qui laisserait à penser quant à la confiance relative accordée à ces établissements). Sous un certain angle l’homme couché se reflète en surimpression des panneaux muraux latéraux de la boutique exposant au choix du client la gamme des cercueils et de leurs habillages. Du satin, de la soie qui sait ? Du doux et du moelleux dans une débauche de coussinets et de petits volants. Fugitive mais troublante surimpression du dormeur du banc au sommeil dépouillé de tout égard et des petits soins garantis au sommeil éternel par la Maison R*** qui sait y faire depuis le temps qu’elle bichonne chèrement les chers disparus. Paradoxe de ce confort, aussi vain que dispendieux, offert au repos des morts quand tant de vivants dorment aujourd’hui à la rue, la nuit le jour, comme et où ils peuvent, dans la ville.

Façades ne vous y fiez pas

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tout n’est qu’apparences.

Banalisation du ruban d’alerte

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J’appelle “ruban d’alerte” ces rubans plastifiés striés rouge/blanc – mais j’en découvre une variante jaune/noir – dont je constate qu’ils sont de plus en plus présents dans notre décor, déployés sans avarice, au kilomètre. Je les avais toujours considérés comme signifiant des espaces lourds de danger, espaces dont l’idéal-type serait le périmètre de sécurité tracé autour de la valise abandonnée en gare du Montparmasse monde en attente des démineurs. J’ignore où s’achètent les rouleaux de ces rubans et ce qu’il en coûte, mais ce que je tenais jusqu’alors pour un accessoire de panoplie hautement sécuritaire, semble avoir été mis ces derniers temps à la portée de tous. Lors de mon prochain passage au supermarché je ferai un détour par le rayon bricolage pour voir si ceux-ci auraient fait leur apparition aux côtés des rouleaux de large scotch marron pour carton de déménagement – à moins qu’ils ne voisinent avec l’extra-fort au rayon passementerie ? Je les chercherai par pure curiosité car je ne m’en suis pas encore trouvée l’usage, contrairement aux responsables du rangement rationnel (RRR en langage DRH) de ces lieux où j’ai récemment repéré leur présence en me demandant quelle mystérieuse danse de Saint-Guy avait saisi, ces jours-ci, dans la ville, les chaises, pour qu’on leur inflige pareille contention ?

Pas sur la route du Tour

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N’ont pris place sur la ligne de départ

celui à qui l’on peut écrire

celui qui se hausse du col

celui qui préfère prendre le métro avec sa provision de Metrocards

celui qui ne peut s’absenter : il vous livre en 24h chrono

celui qui se passe de commentaire

ni celui qui est allé droit dans le mur

rue des Boulangers, Paris, Ve arrondissement, et ne lâchera rien.

Abandon sur voie publique

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Certes il fait chaud dans la ville et dans nos maisons dans la ville ces jours-ci, mais, de là à abandonner lâchement ses radiateurs au pied d’un arbre comme de beaux salauds leurs chiens au moment de partir en vacances, il y a encore de la marge. L’hiver tout en froidure reviendra, c’est sûr, et les propriétaires indélicats de ces calorifères regretteront leur mouvement d’humeur estival. Bien fait pour eux.

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