L'employée aux écritures

le blog de Martine Sonnet – ISSN : 2267-8735

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"Le problème de la nuit reste entier. Comment la traverser, chaque fois la traverser tout entière ?" Henri Michaux

New York bleu samedi

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Ce samedi New York était franchement bleu. Le samedi matin les New-Yorkais promènent leurs chiens et leurs enfants, en laisse, sur leurs épaules, en charriots attelés à leurs vélos, en poussettes à rollers. Certains font d’une pierre deux coups et apprennent à leurs enfants à promener les chiens. En semaine les chiens sortent aussi mais leurs promeneurs sont mercenaires et les enfants traversent la ville dans des autobus jaunes. J’imagine que les New-Yorkais se procurent leurs enfants à peu près comme nous, mais leurs chiens, la variété des modèles induit la question de leur provenance. J’en ai croisé aujourd’hui des espèces tout à fait inconnues des trottoirs parisiens et dont les gabarits s’échelonnaient du guère plus gros qu’un écureuil au veau bien en chair. J’ai même croisé un excentrique tracté par ses deux veaux. Mais dans l’Hudson River Park, ce que je regardais, c’était la ville de l’autre côté, comme elle était bleue.

Filed under New York City

Les invités : Maryse Hache

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Dans le cadre des échanges entre blogs du premier vendredi du mois je suis particulièrement fière que Maryse Hache, du si beau Semenoir et de l’Abyssal cabaret (que l’on peut désormais lire aussi sur papier), ait choisi de lever le voile ici sur un travail qu’elle entreprend autour d’archives familiales – je n’en dis pas plus, elle présente elle-même son corpus mais je lui exprime toute ma gratitude pour ce cadeau fait à L’employée aux écritures. Chez elle, on peut lire mon New York, jeu de miroir, reflet amusé de la ville dans laquelle je séjourne quelques semaines, accueillie au Remarque Institute, NYU. Comme d’habitude, la liste établie par Brigitte Célérier@brigetoun si vous préférez – aide à se repérer dans tous les échanges annoncés. Merci à elle aussi.

depuis un moment vagabonde en moi un chantier rêvé d’écriture autour des correspondances de mon père, (échangées avec ma mère, ils venaient de se fiancer)  pendant ses presque six ans de captivité dans un camp en silésie orientale

je choisis, avec l’accord bienveillant, de martine sonnet, et à l’occasion de ce premier vase avec elle, d’ouvrir ce chantier en ses terres et sous son égide

gratitude

que l’écriture aille son chemin

.

pour l’instant ça s’appelle (emprise)

(essaierai de trouver le “e” majuscule particulier à son écriture)

terme qui fera vignette de ce chantier au semenoir

ce mot, je l’ai trouvé écrit manuscrit sur un petit bout de papier esseulé dans ses affaires

on peut lire, écriture inversée typographique, dans le coin supérieur droit, une fin de mot : “…ons” peut-être une terminaison de verbe conjugué, et “inutiles”

énigme

la force émotive et éveillante du mot manuscrit, soudain offerte à nouveau à ma lecture, marque de la main, gestuelle de l’écriture, forme des doigts, des ongles, alliance et bague, est plus forte pour moi qu’une photo

plus dynamique


.

il  ne se doute de rien

sa blondeur sa jeunesse répondent à l’appel du service militaire

pour l’instant cavalier 2° escadron 29 novembre 1939 à st germain-en-laye

il a 21 ans

ne se doute de rien

.

.

sauf

ses yeux bleus ont déjà croisé les yeux marron de geneviève

elle a 27 ans

train ligne denfert-rochereau direction seine et oise

lui monte ou descend station orsay il habite chez ses parents

il travaille chez ses parents paris 14°

elle monte ou descend à deux stations de différence, c’est lozère

elle habite chez sa tante c’est plus prudent en ces temps incertains

elle travaille à paris

horaires réguliers du train

ils y sont souvent ensemble se voient se regardent

et c’en est fait d’eux

“je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue”

.

il a fumé quelques unes de “leurs” cigarettes

“les cigarettes sont épatantes”

.

.

“… vous remercier de votre aimable attention”

“Je vous écrirai plus longuement dans quelques jours”

.

.

Filed under Les invités

Montparnasse monde trompeur

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C’était donc cela, juste un revêtement sur boule synthétique cotonneuse moulée à la louche, quand on les avait crues éclosions moussues spontanées sur lits de galets (quelle promesse ce serait “à la carte” l’éclosion moussue sur son lit de galets, j’en ai l’eau à la bouche),

surgies dans le cadre d’un énième plan de verdissement de la gare, superbes, généreuses, rebondies, choufleuresques.

Ce qu’il en reste aujourd’hui, pauvres d’elles, sans naturel et pourtant caduques, annonces d’hiver et désolation.

Filed under Montparnasse monde

Le sens des mots n’a pas fini de nous échapper

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D’un nuancier entendu au téléphone

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Je regarde le nuancier, mon mari n’est pas là, mais je déciderai toute seule disait hier soir au téléphone ma voisine  de l’omnibus Sèvres Rive Gauche de 19h01 (depuis mon retour de vacances, quoi que je fasse, d’où que je vienne, je me retrouve tous les jours dans le train quittant le Montparnasse monde à 19h01) à un artisan qui avait fini de poser toutes les baguettes et cela rendait très bien, oui, elle en était contente même si elle ne le lui avait pas encore dit (et il s’en inquiétait).

Voisine d’âge moyen-mûr – je veux dire plus vieille que moi, mais au fond peut-être pas tant que cela -, à la mise discrète pour ne pas dire soumise, à qui l’on aurait donné le Bon Dieu sans confession. Mais sa détermination à choisir sans attendre le retour d’un mari en déplacement, donc hors de tout processus de concertation, la couleur nouvelle d’un décor partagé avec lui depuis des lustres prenait un tour transgressif qui faisait plaisir à entendre.

On sentait bien qu’elle ne prenait pas tous les jours de son propre chef une décision de cette importance et que l’artisan à l’autre bout du fil sans fil, habitué des longs conciliabules conjugaux au dessus de son nuancier, pouvait s’émouvoir d’une audace pareille. Si le dressing-room champagne ne plaisait pas à Monsieur, est-ce que l’on ne viendrait pas lui en faire reproche à lui qui n’aurait pas su doser le mélange des teintes avant d’y tremper son rouleau ? Plus rosé, le champagne, elle lui avait pourtant bien spécifié champagne rosé. Du moins le prétendrait.

Ecoutant ma voisine dont j’approuvais évidemment la résolution émancipatrice, je songeais que j’ai toujours été sensible aux nuanciers et autres albums d’échantillons de papiers peints ou de tissus, ces épuisements/mises à plat de toutes les valeurs possibles d’une couleur ou d’un motif.

Et je me souviens qu’à l’époque enfuie où l’on pouvait commander gratuitement des échantillons de tissus d’ameublement à la Redoute ou aux 3 Suisses je ne me privais pas de le faire, bien que n’en ayant nul besoin.

Filed under variétés

Signes de vie

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A certaines heures

pas forcément les plus chaudes

traversant à vélo les villages

les signes de vie

il fallait les chercher longtemps

(tiens, Placide Ménage a changé de numéro de téléphone). Heureusement la recrudescence des pois de senteurs

la fière solidité des squelettes

et, jamais loin, les bêtes, accourues, curieuses.

Rhabillée de la tête aux pieds

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Pour Anne à qui je disais récemment qu’échouaient chez L’employée aux écritures de nombreuses requêtes d’internautes portant sur des questions vestimentaires, ces quelques échantillons.

Au rayon dames certaines sont prévoyantes, songeant déjà à acheter des robes d’hiver en France et même des robes d’hiver pour toujours – souci d’éternité que ne partage pas celle qui veut une robe de moins de trente ans. Mais l’été n’a pas jeté ses derniers feux et les estivantes tardives – comme moi qui ne suis pas encore partie en vacances – rêvent encore d’une robe pour se promener le soir à porter sous un chapeau avec cerises. Ma boutique est fréquentée aussi par des clientes lettrées, sensibles aux souffrances du jeune Werther et désireuses de porter ses couleurs. Sinon, pourquoi vouloir assortir robe bleue souliers jaunes ou se lancer dans la recherche éperdue d’une robe jaune et bleue longue d’occasion avec malheureusement un budget limité contraignant à devoir se contenter d’une seconde main ?

Je me demande si la robe billet de métro que je suis incapable de fournir procède du même principe de confection qu’une robe vue dans mon enfance – mais sur qui et dans quelles circonstances je ne m’en souviens plus – résultant d’un assemblage de cravates de soie cousues bord à bord. D’abord on ne remarquait que le chatoiement et la bigarrure, et puis la porteuse-créatrice de la robe révélait son secret : la longueur qui était bonne avec le chic de l’effet cranté et l’ampleur évasée pile poil conférée par la forme des cravates. La matière des tickets de métro s’y prête moins, sans parler de la patience de la couturière.

Au rayon hommes,  le vêtement de travail est bien porté, qu’il s’agisse du bleu de travail qui dit son usine, de la tenue professionnelle employé de rayon, qui dit son grand magasin (à ce propos, connaissez-vous le magnifique Calicot de Xavier-Edouard, Michel et Philippe Lejeune ?) ou du costume employé aux écritures XIXe siècle, dont les manchettes de lustrine s’usent sur les bureaux des ministères. Le dimanche et les jours fériés on se met sur son 31, on s’interroge sur le noeud papillon d’avant et de maintenant et, jusqu’à Montigny-le-Bretonneux, on cherche un gilet homme beau. La requête pour une robe de chambre homme n’est pas localisée mais proviendrait d’un Langrois que ça ne m’étonnerait pas, sans vouloir me mêler de ses affaires je lui déconseille toutefois de se défaire de sa vieille, il s’en mordra les doigts.

Une chose qu’il ne faut plus me demander, ce sont les jupes noires : le rayon est liquidé.

Forte tête rue Pierre Nicole Paris Ve

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Je pensais que mon regard sévère aurait tôt fait de le convaincre de rectifier sa position acrobatique déplacée  - la chaleur n’excuse pas tout -

mais il m’a juste semblé, et encore au bout d’un certain temps, seulement rougir de son audace.

Une chance que je n’aie pas été pas accompagnée de jeunes enfants auxquels j’aurais appris qu’il faut toujours s’en remettre au petit bonhomme vert pour savoir quoi faire.

De quoi aurais-je eu l’air ?

D’être tombée sur la tête.

En tout cas, ce n’est pas son cousin berlinois qu’on verrait se mettre dans un état pareil. Son chapeau ne le supporterait pas.

Cette pharmacie, Lhopitallier, vous vous souvenez

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Rue Soufflot, difficile de l’ignorer, depuis le temps

mais c’est fini,

la pharmacie ne sera plus de garde qu’au musée. En attendant, sans les boiseries, c’est un peu étrange

ce que l’on voit de la rue, des restes de papier peint très ancien,

et puis cette fenêtre intérieure, vue sur carrelages,

du balai tout ça

faire place nette

à qui ? j’y verrais assez bien des banquiers. Ce journal annonce des habilleurs.

Je vous dirai, je passe souvent par là.

Questions directes pour attendre l’été

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L’employée aux écritures affectée par la précocité de l’effondrement estival de la fréquentation de son blog que rien ne justifie puisque, à ma connaissance, l’été n’est pas là, a décidé, au cas où les neuf visiteurs passés hier reviendraient aujourd’hui, de se rendre utile en répondant à quelques questions posées récemment par des internautes.

Comment faire une remarque à l’employée ? Avec des gants de préférence mais pas de boxe.

Comment rabattre ses cheveux ? Les averses de ces jours-ci s’y prêtent parfaitement et à moindre frais, à condition d’être rapide : sortez de chez vous dès les premières gouttes et tout se passera bien.

Que cultiver au jardin en avril ? Je passe, j’arrive trop tard, désolée. Mais l’internaute cherchant un renne de Noël en matière végétale a tout intérêt à le planter un soir de pleine lune en juillet : il sera au mieux de sa forme pour épater les invités de son réveillon.

Comment teinter des semelles de chaussures ? Plantez un crayon (encore très peu taillé sinon il n’aura pas la taille nécessaire) au centre du soulier, équipez le d’un mouchoir en tissu, de préférence uni blanc, hissez la voilure et faites flotter la chaussure à la surface d’un pot de peinture de diamètre  égal à votre pointure multiplié par Pi et de la couleur souhaitée. Au besoin faites composer un mélange de teintes si vous ne la trouvez pas toute faite. NB : Si vous chaussez petit, portez des semelles de crêpe et appréciez les tons violacés, un pot – modèle familial – de confiture de myrtille rend le même service et se recycle au petit déjeuner.

Comment ranger les livres hors poussière ? Je ne connais pas de bonne méthode, il y a beaucoup de poussière sur certains des miens, mais le développement du numérique laisse entrevoir quelques espoirs.

Quel effet du gel sur les tuyaux ? Nocif.

Quelles habitudes le casse-noix moucheté ? Je simplifie parce que c’est un oiseau des plus sophistiqués dans son mode de gestion de ses provisions alimentaires. Disons que son bec extrêmement dur lui permet, en saison, de casser les graines des pommes de conifères, du pin cembro par exemple, pour en extraire les amandes dont il se constitue pour l’hiver de petites réserves connues de lui seul et qu’il retrouve (même sous la neige) dans la plupart des cas.

Où trouver des cageots ? Ici, rue Gambetta, s’ils y sont encore.

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