A Campagne Première
Patricia embrasse Michel
pellicule à bout de souffle
le blog de Martine Sonnet – ISSN : 2267-8735
Après les tests des couleurs de revêtements pressenties, dont je rendais compte ici-même il y a quelques semaines, c’est aujourd’hui un modèle de panneau de verre (destiné à parer le soleil ou à produire quelque autre effet transitionnel énergétique ?) amovible découpé en bandes verticales, qui est à l’essai en façade du centre Jean Sarrailh dans le cadre de ses travaux de réfection.
Outre l’alourdissement général de l’aspect du bâtiment si le principe de ce store vénitien debout était adopté, vous constaterez comme moi en vous reportant à mon précédent billet sur le sujet que le petit pan de mur jaune a fait les frais de cette tentative d’ajout, ce que je déplore. L’ambition chromatique des rénovateurs se réduit désormais à la gamme des orangers/rouges. Affaire à suivre.
Place de Catalogne
là où coulait (mais n’avait pas coulé longtemps hélas) le miroir d’eau, rond, incliné, apaisant
Creuset du temps du sculpteur Shamaï Haber
est annoncée une forêt urbaine
qui commence petite et en pot
pas de quoi perdre un petit Poucet
Je n’aime pas l’expression, usée jusqu’à la corde, “trous dans la raquette” et pourtant j’y pense immédiatement quand je prends conscience, marchant droit dans son axe au milieu du terre-plein central du boulevard Edgar-Quinet, du nombre d’écailles manquantes en façade de la tour Montparnasse. Je ne vous en montre qu’un échantillon mais croyez moi il en manque partout. Détachées spontanément, envolées, décrochées préventivement quand elles commençaient à s’écorner, qui sait. Pas beau à voir, ce qu’il y a en dessous : la tour banalement isolée comme vous et moi à la laine de verre vieillissant mal ? J’ignore s’il est prévu de remédier aux défaillances du revêtement avant la mise en oeuvre du grand projet de rénovation annoncé, prometteur d’une végétalisation de l’édifice. Je ne demande qu’à voir la tour bourgeonner, verdir, fleurir et nous rafraîchir de ses fruits mais, en attendant, les taches jaunâtres se multiplient et ce laisser aller au Montparnasse monde me consterne.
Pour mémoire : la série Montparnasse monde existe sur ce blog depuis septembre 2008, le livre Montparnasse monde est paru en janvier 2011.
Cette fois c’en est fini de l’affichette qui s’était vaillamment maintenue d’avril 1997 au moins jusqu’au printemps 2021 (c’était son côté petite chèvre de Monsieur Seguin, j’aimais bien), retrouvée réduite à l’état de malheureux lambeau le 1er décembre 2022. Aujourd’hui, 11 février 2023, comme j’allais faire au lycée Hoche la conférence annoncée ici-même il y a quelques jours, j’ai constaté que ne restaient en place que les 4 punaises, chacune ne fixant plus de sa pointe que quelques millimètres carrés de papier, guère plus que la surface de sa tête.
Sur la palissade métallique entourant les beaux bâtiments qui abritèrent l’annexe de la Bibliothèque Nationale, la rouille fait par endroit son oeuvre, juste de quoi glisser l’oeil photographique curieux du téléphone.
Et découvrir qu’il ne se passe rien. Mais alors la poubelle jaune : à quoi bon ?
Un peu d’auto-promotion : samedi 11 février, de bon matin, je parlerai d’éducation des filles au XVIIIe siècle, au lycée Hoche à Versailles, dans le cadre du 250e anniversaire de la clôture du couvent de la Reine. Parce que le lycée Hoche occupe les bâtiments que Marie Leszczynska avait fait construire pour y installer des religieuses augustines de la congrégation Notre-Dame aux fins d’y enseigner les petites Versaillaises. Dans les beaux murs élevés par Richard Mique, les soeurs de la congrégation Notre-Dame, enseignantes par vocation, recevaient des élèves pensionnaires et des écolières externes.
Je suis doublement émue par cette invitation, d’une part parce que cela fait 40 ans tout rond ces jours-ci que j’ai soutenu ma thèse “L’éducation des filles à Paris au XVIIIe siècle” (devenue un livre sous le titre L’éducation des filles au temps des Lumières) et que je n’imaginais pas, le jour de ma soutenance, que 40 ans plus tard je serai encore sollicitée sur ce sujet.
Et d’autre part parce que, alors que que j’en ai parlé en bien des lieux, c’est la première fois que j’en parlerai in situ : dans un établissement d’enseignement féminin des Lumières.
Grands draps tendus au chantier
quelle petite main les a si bien
lavés
repassés
pliés
et sortis de la pile dans l’armoire
?
Soit un pan de mur jaune, pas si petit que ça, vu du train arrêté en gare de Vanves-Malakoff
et sur le pan de mur jaune des plus petits pans de mur jaune encore plus jaunes.
Quel petit pan de mur jaune est le petit pan de mur jaune ?
Et pour rester avec Proust : en 2023 je célèbre le cinquantième anniversaire de ma première lecture de La recherche du temps perdu. L’été 1973, juste après le bac, lecture commencée sur le chantier de fouilles d’une sépulture collective néolithique (avec invités mérovingiens) à Vierville dans le Cotentin. Lecture en grande partie à la lampe de poche sous ma tente puisque nous campions fort sommairement sur le chantier et que je n’ai jamais pu fermer l’oeil hors de murs solides. Lecture continuée en attendant ma première rentrée à la fac (Paris 7 Jussieu), puisque les cours ne commençaient à l’époque qu’en octobre – je lisais la suite dans des conditions matérielles moins spartiates mais en proie à mille interrogations sur la vie étudiante que j’allais aborder.
Cinquante ans après et alors que ma carrière officielle vient de s’achever, j’ai décidé de profiter de mon temps gagné pour revenir au temps perdu. Donc relecture de la Recherche à l’approche, nantie de cinq décennies de plus et de quelques expériences qui me faisaient défaut à 17 ans. Je m’y jette dès que j’en aurai fini avec les deux volumes folio de la biographie de Marcel Proust par Jean-Yves Tadié, qui me tiennent lieu en quelque sorte d’antichambre de relecture.
Il y a deux semaines, je m’émouvais ici-même de la mise à mort de nos lettres les plus personnelles et les plus urgentes, effet collatéral de la mise à mort du petit timbre rouge. Mais je n’avais pas encore tout vu. Ce matin, à la brocante du boulevard (dont je vous entretiens régulièrement des trouvailles que l’on peut y faire) j’ai croisé ce signe concret de l’accélération de la déconfiture postale qui nous attend avant même l’instauration des tournées de facteurs non plus quotidiennes mais sporadiques.
Et m’est revenue une chanson que Georges Moustaki chantait avec Catherine Le Forestier sur un jeune facteur qui n’avait que 17 ans et n’irait plus sur les chemins fleuris de roses et de jasmin : vous vous souvenez ?
Les travaux de rénovation du centre Jean Sarrailh du CROUS de Paris – abritant notamment une résidence universitaire et un gymnase – tout en haut du boulevard Saint-Michel mais en réalité sur cette courte avenue Georges Bernanos qui le prolonge, au n°39 pour être précise, ont commencé. Et je constate qu’on y teste déjà des revêtements de façades colorés, dans une gamme de teintes chaudes qui tranchent sur les gris vert délavés que j’ai toujours connus bien que je n’aie jamais eu l’usage de ce bâtiment quand j’étais étudiante (logée alors dans l’appartement de banlieue laissé vacant par le retour à la province de parents retraités). Si le test en cours est jugé convaincant, l’avenue Georges Bernanos dont on oublie toujours l’existence s’en trouvera réveillée en fanfare quelle que soit la combinaison tricolore validée – à moins que les trois soient adoptées et se répartissent (par étages ? en colonnes ?) pour couvrir toute la longueur de façade. Réponse en fin de chantier, en 2024 théoriquement.
Ce n’est pas la première fois que je m’arrête photographiquement, en passant, sur cette étape initiale dans des travaux de rénovation. Sans doute une trace résiduelle de mon goût d’enfance pour tout ce qui s’apparentait à des nuanciers ou à des échantillons, de peintures, papiers peints ou tissus, avidement collectés comme autant de gammes de possibles, espoirs d’horizons moins monotones.
Ces jours derniers, je suis repassée rue de la Glacière voir ce qu’il était advenu d’un immeuble dont j’avais saisi l’essai des matériaux de revêtement pour constater que, grosso modo à quelques ajouts de bordures près, ce qui avait été testé a été adopté.
Même exercice au Montparnasse monde lors de la récente rénovation de la gare : le principe testé au commencement des travaux a été retenu mais un contraste noir/blanc est venu briser l’uniformité blanche initiale. (Je me félicite du bon archivage de mes photos permettant ces comparaisons avant/après).